mardi 10 février 2015

Alléger mon sac... Pourquoi et comment ?

J'aurais pu appeler cet article "séquence psy" ou "recueil de réflexions", celles issues du temps que j'ai à perdre tous les jours sur le trajet du boulot... Désolée pour ceux qui trouvent que je parle trop, ils n'ont qu'à se dire que c'est un jeu et regarder ailleurs le temps que je me calme ;-)

Je le disais par ailleurs, si je devais partir demain pour 2 mois, il me suffirait de récupérer dans mon sac habituel ce qui y est déjà, d'y ajouter notre matériel de bivouac, d'attraper quelques vêtements au vol et de caser le tout dans le vieux 70 litres qui est planqué en haut de l'armoire. Sauf que tout cela n'est pas adapté à mon projet sur le GR10, ne m'emballait pas et représenterait, à l'estime, dans les 16kg. Trop... 


Alléger,.. Encore fallait-il savoir comment faire... Sur le net, et en particulier sur le site (et forum) des M.U.L. (Marcheurs Ultra Léger), on trouve de très bons conseils (que je vous laisse découvrir ici) et de très belles formules : Un sac lourd est un sac bourré d'angoisses, le plus léger est ce que l'on n'emporte pas, etc. Tout cela est vrai. Evidemment.
Dans un premier temps, j'ai procédé sans méthode précise, en suivant ces divers conseils de plus ou moins loin. J'ai sorti de mon sac ce qui est superflu pour une raison ou une autre, me suis intéressée au matériel léger que l'on trouve ici ou là, lu des témoignages et récits, ...
Initialement, mon objectif était de ne pas dépasser 12kg ravitaillement compris, soit quelque chose comme 6kg hors ravitaillement. Or j'arrivais à moins de 5kg, ce qui aurait dû me convenir. Pas mal d'ailleurs me direz-vous même si on peut faire beaucoup mieux. D'autant que si j'en crois ce que je lis sur le net, beaucoup s'en contentent. Sauf que cela s'accompagnait d'un profond malaise. Sensation de prendre le problème à l'envers, et d'y perdre l'envie. Au point d'avoir envisagé de faire purement et simplement une croix sur mon projet... Heureusement qu'un ami m'a embarquée en rando avec lui, me permettant de retrouver le plaisir de la marche pour la marche, sans autres questions.
Au final, en allégeant par principe, je me sentais comme cet anorexique refusant toute nourriture jusqu'à ne plus exister parce qu'il veut rien (merci Lacan), dans un déni du désir où il ne cherche en réalité qu'à être au lieu d'avoir. A écarter tout ce qui n'était pas vital, c'est à dire ce qui n'était là que par envie, à vouloir "rien" (différence entre n'avoir envie de rien et avoir envie qu'il n'y ait rien...), j'y perdais ce qui fait que je suis moi.

Et puis soyons honnêtes : si je veux alléger le poids à porter, il faudrait que je commence par retrouver mon poids de forme en perdant les 3 ou 4kg pris depuis 1 an. Certainement bien plus bénéfique, à tous points de vue. En outre, en revoyant ma copie j'ai constaté que je sur-estimais le poids du ravitaillement dont j'aurai besoin (bouffe et eau), ce qui me laisse un peu plus de marge que prévu.


Alors alléger, oui, mais pourquoi ? Pour gagner en confort de marche, limiter la fatigue, pour économiser les articulations, ... c'est évident. Pour gagner en vitesse lorsque la sécurité l'impose (encore que, au pire, on peut toujours abandonner le sac...), c'est clair. Mais je sais très bien que je peux porter bien plus, que mes articulations encaissent un poids très supérieur... Alors finalement, tout ramener au poids, n'est-ce pas une "autre" forme d'angoisse ? Quel est ce poids que j'ai sur les épaules et dont je voudrais me débarrasser ? De quoi est-ce que j'en ai "plein le dos" ? Bonne question ! Encore que... Bref.

Et autrement dit, quel était mon but réel ? Tant que je ne le ciblais pas, tant que je me contentais de "copier" les objectifs fournis par d'autres, voire de les laisser me fournir les solutions, je ne pouvais avancer, et plus je me forçais, plus ça coinçait. Je suis mon chemin, je n'aime pas qu'on me dise par où passer. Tout au plus qu'on me le propose...

C'est loin d'être la première fois que je pars seule à l'aventure sur de relativement longues périodes, même si ce sera la première fois que je le ferai à pieds. En outre, j'ai habité des années dans une maison isolée en montagne avec les galères qui vont avec en hiver par exemple, j'ai participé à diverses "missions caritatives" dans des conditions parfois difficiles et sans parler des diverses randos que je fais depuis quelques années, j'ai d'autres projets. Pourtant, je ne me pose et ne me suis jamais posé toutes ces questions dignes d'une débutante. Il y a quelque chose de particulier dans ce projet, dans les Pyrénées en elles-mêmes. Il devenait clair que la première étape était de comprendre ce que ce projet pourtant relativement banal a de particulier...

Il m'a fallu quelques heures de méditation, d'introspection et de langage des oiseaux pour comprendre... Les Pyrénées, cela a toujours marqué dans ma vie le début d'une nouvelle étape. Je m'y suis réfugiée à tous les moments "charnière" importants. C'est un début, un nouveau départ. Comme un port (le Pirée) vers une nouvelle étape de vie, comme une nouvelle naissance. Et cette fois-ci, c'est l'espoir d'une vie débarrassée de certains poids-lourds, de certaines contraintes que je me suis laissé mettre sur le dos depuis des années sans réellement les choisir et qui m'immobilisent, m'empêchent d'avancer dans la vie... Tout un symbole...

Mais surtout, cela met en évidence l'objectif réel. Qui n'est pas le sac le plus léger possible, mais le sac "qui ME convient", celui que j'aurai constitué sans laisser personne choisir à ma place, celui du juste besoin, débarrassé des éléments qui ne sont là que faute de mieux, ... Quel que soit son poids ? Non, évidemment. Mais il n'est justement que l'UN des paramètres. Les autres sont mes besoins, vitaux ou non, ma façon d'être et de vivre, et l'envie... Y compris l'envie d'un sac léger, d'ailleurs...
C'est comme le rapport qualité/prix ou la valeur (au sens de l'analyse de la valeur) : La qualité d'un équipement de randonnée est une grandeur qui croit lorsque la satisfaction du besoin augmente et/ou que le poids diminue... 

Donc alléger, oui, mais comment ?

Se ramener au strict besoin (au sens de la différence entre besoin vital ou de sécurité et simple envie), et enlever le superflu, c'est une évidence. Inutile, par exemple, de conserver le superbe compas très précis qui traîne dans le fond de mon sac depuis 107 ans sans jamais en sortir au point que j'avais presque oublié qu'il était là ! De fait, je me contente largement de la boussole type gadget sur mousqueton que j'ai à la ceinture... Je ne pars ni en haute mer ni en plein désert, pas la peine de "tracer la route" au demi degré près. Et ce n'est qu'un exemple.

Dans la même optique, il est parfois conseillé de laisser derrière soi ce qui n'a pas servi lors des balades précédentes. Vrai aussi, pour la même raison. Si cela n'a pas servi, il y a des chances que ce soit parce que c'est superflu. Sauf que ça peut aussi être totalement faux si l'environnement change et que ce qui était superflu hier soit indispensable demain. Il suffit de rentrer de jour plusieurs fois de suite et, à ce jeu là, on laisse chez soi la lampe nécessaire lorsqu'on rentre de nuit...
Et ce qui ne sert pas, voire n'est pas essentiel ou vital doit-il pour autant être systématiquement considéré comme à laisser derrière soi au risque de totalement dépersonnaliser l'ensemble ? Il y a plein de choses dont, finalement, on pourrait très bien se passer et que beaucoup emportent quand même : oreiller, savon, appareil photo, téléphone, ...

Inversement, ce qui est régulièrement utilisé est-il vraiment à conserver ? Je ne sais pas vous mais la majorité de mon matériel provient de cadeaux, de récupérations diverses, et d'achats faits "à l'économie". En hiver j'utilise un pantalon d'équitation, ma veste imperméable est une (très vieille) veste de marin, mon sac à dos ne convient pas vraiment à ma morphologie et n'avait que l'intérêt de son faible prix (rachat dans une braderie), etc. De fait, inutile de se contenter de lister le superflu, c'est la totalité (ou presque) de mon équipement qui est bon à revoir...

Les excédents sont révélateurs de nos angoisses... C'est clair. Inutile d'emporter 25 briquets et 36 pulls par peur du froid ! Mais doit-on pour autant mépriser ses angoisses et se contenter de les virer à coups de pieds aux fesses en jetant ce qui les calme ? Malheureusement, cela ne fonctionne pas face aux "vraies" angoisses. Mises dehors par la porte, elles reviennent par la fenêtre, en général avec des copines à elles... Autrement dit, c'est comme les phobies : la seule solution est d'en comprendre l'origine et d'en dénouer le fil, sinon elles finissent toujours par réapparaître, sous une forme ou une autre... A défaut de s'abonner chez un psy, n'est-il pas préférable de faire un compromis et de trimbaler quelques centaines de grammes de plus plutôt que de vivre une inquiétude pouvant handicaper les choix de parcours, voire remettre en cause la sécurité ? Je pense par exemple à une amie qui a peur de l'eau et serait (réellement) incapable de franchir un gué si elle n'a pas de bottes, quitte à devoir faire un détour de plusieurs km par des sentiers difficiles.
Le gag est que, parfois, ce sont les absences qui révèlent les dites angoisses... Cela a très longtemps été mon cas avec les bâtons de randonnée, par exemple. Et encore aujourd'hui, je préfère m'en passer, ne les utilise que sur des terrains très pentus et les laisse généralement chez moi... Et puis je le disais plus haut : la peur de ce poids sur les épaules, symbolique ou non, n'est pas négligeable non plus... Certains ne vont-ils pas jusqu'à prendre des risques en se passant de "l'essentiel" au nom de la légèreté ?

Remplacer un élément par une solution voisine plus légère : une priorité lorsque c'est possible. Mais c'est souvent perdre certaines fonctionnalités, les remplacer par d'autres. Cela peut être une très bonne chose lorsque c'est un choix. Mais encore faut-il que ce le soit... Or c'est souvent suite à ce type de manip que l'on prend conscience de toutes les utilisations du truc que l'on a laissé derrière soi, ou de l'importance de certaines caractéristiques... Pas gênant lorsqu'il ne s'agit que de changer ses habitudes, nous l'avons tous vécu en changeant de sac ou de veste (et de poches). Mais sur le coup, je repense à mes parents changeant de voiture après une longue réflexion et découvrant très vite, mais trop tard, que la nouvelle était trop basse pour rentrer dans le jardin...

Essayer et tester... La meilleure solution, certainement. Ce n'est qu'ainsi que l'on prend conscience de l'aspect oublié dans la réflexion, que l'on trouve de nouvelles solutions, que l'on apprend à utiliser du matériel, ou à s'en passer, ... Encore faut-il le pouvoir. C'est à dire pouvoir disposer du matériel à tester, et avoir la possibilité de faire suffisamment de sorties pour pouvoir réaliser ces tests dans des conditions représentatives. Tester un abri dans son jardin n'a pas grande signification, pas plus que de tester un pull en été ! Qui plus est, outre que j'économise mes jours de congés en vue de ce projet et suis donc un peu coincée au niveau du nombre de balades dignes de ce nom, les randonneurs que je côtoie généralement ne sont pas dans cette démarche du "léger" et me regardent même plutôt avec de grands yeux lorsque je leur en parle. Difficile, donc, d'emprunter certains trucs typiques de la "randonnée légère"...

Autrement dit, toutes ces méthodes sont bonnes, mais ont leur défaut. Reste, j'en parlais plus haut, les techniques plus systématiques au croisement de l'innovation et de la psychologie, telles que l'analyse de la valeur et ses copines, analyse fonctionnelle, APTEapproche systémique, etc. avec Maslow et sa célèbre pyramide des besoins en trait d'union, merci à lui !

Et là, je me retrouve en terrain connu. Du moins en termes de méthode. Ce sont des éléments classiques de mon métier ! Sauf que tout cela demeure au stade du conscient et néglige l'aspect inconscient pourtant fondamental. Ce qui rejoint la problématique de la pure envie et des angoisses... 

Alors, comme diraient certains, si on stoppait les bla-bla et que l'on passait à l'action ? Ou plus exactement, maintenant que j'ai bien cassé du sucre sur les solutions destinées à alléger un sac, je fais quoi, ou comment ? L'idée, c'est de partir d'un mélange de tout ça... Sans en faire un marteau pilon pour écraser une mouche, mais au moins dans les grandes lignes.
  1. Faire le point sur les diverses situations : lister les diverses activités de la journée (et la nuit) au cours de la balade en mettant en face un environnement (géographique, climatique, ...) plus ou moins probable.
  2. Faire un peu d'analyse fonctionnelle sur ces divers cas, afin de lister les besoins ou, plus exactement les fonctions à remplir par le matériel, y compris en termes de fonctions d'estime, c'est à dire de désir... Et les hiérarchiser en fonction de leur criticité, c'est à dire dans le cas présent de leur hauteur dans la Pyramide de Maslow
  3. Faire le point sur les solutions à mettre en face, que ce soit dans le matériel dont je dispose déjà ou dans celui que je suis en mesure d'obtenir, que ce soit en l'empruntant, en l'achetant ou en le fabricant. Et coter ces solutions en fonction de la façon dont elles satisfont les fonctions, de leur poids, de ma capacité à me les procurer, et de l'envie que j'y associe. En testant en pratique, dans la mesure du possible, celles auxquelles je ne sais pas mettre de pondération.
  4. Faire le choix...

Rien de très nouveau, me direz-vous... C'est vrai. D'autant que c'est surtout une question de bon sens et la démarche utilisée par beaucoup sans la formaliser. A un élément près : la prise en compte du désir et de l'envie... Quant à savoir la pondération à y associer... J'ai donné la réponse plus haut : elle dépend de ce que cela entraîne quant à l'envie générale de faire la rando (je ne souhaite pas transformer certains moments en véritable corvée si je peux facilement faire autrement, par exemple) et, dans les cas liés à des angoisses, de l'handicap que cela peut entraîner dans certaines circonstances.

Et maintenant que j'ai passé l'étape nécessaire pour moi de comprendre mon objectif et le chemin qui y mène... Y'a plus qu'à !

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