samedi 21 novembre 2015

Tour du Cervin - Epilogue

Je me décide enfin à conclure ce récit. Avec nostalgie, comme si mettre ce point final à l'histoire m'éloignait encore un peu plus de ces merveilleux paysages. Bref.


Jours 7 et 8 : balade dans les alpages

Env 18km, D+ / D- 1200m
Trace reconstituée, très approximative

Avec tout le fromage avalé hier soir et malgré sa qualité, la suite était prévisible : j'ai eu du mal à digérer et j'ai mal dormi malgré le confort du siège de la voiture (oui, j'ai la chance d'être assez petite pour dormir confortablement dans une voiture, ce que j'ai fait bien souvent en diverses circonstances). 
Réveil vaseux donc, et comme JL est à peu près dans le même état pour les mêmes raisons, voilà ce que c'est que de manger un peu (beaucoup) trop gras lorsqu'on n'y est pas habitué, nous traînons à nous mettre en route... Direction le bar le plus proche, pour une opération "café à haute dose", en multipliant les tasses à défaut de pouvoir le prendre en intraveineuse. 

Petite hésitation de principe quant à la suite du programme. Même si nous ne regrettons pas notre décision de zapper quelques étapes d'altitude du fait de la météo, maintenant que le beau temps est revenu la frustration est là et nous n'avons pas envie de rentrer directement chez nous alors que les alpages voisins nous tendent les bras.

La Forclaz, Le Tsaté, ... Photo faite la veille

Qu'à cela ne tienne, c'est parti pour les prolongations bien que la journée soit déjà bien avancée. Nous nous garons à La Forclaz au dessus des Haudères, refaisons les sacs en version light pour 24h, et nous mettons en mode exploration (balade sans préméditation du parcours).



Dans un premier temps, nous montons vers Motau


et continuons vers Le Tsaté.




Jolie grimpette en plein soleil qui, surtout après la mauvaise nuit, impose de se réhydrater régulièrement... Gourdes vite vides, heureusement que les ruisseaux sont nombreux, merci aux pluies de ces derniers jours.


Nous partons ensuite vers le Nord, le long de divers sentiers ou à travers les pâtures, avant de faire une pause repas complétée d'une petite sieste à proximité de l'Orvelle, puis de continuer tranquillement vers le Nord et Cotter.


Rythme lent et contemplatif, l'objectif n'est pas d'enchaîner les kilomètres ou le dénivelé, mais uniquement de prolonger le plaisir, comme pour se donner l'illusion que les vacances ne sont pas (déjà) finies...


Bivouac en lisière de forêt au dessus d'Evolène. La patronne du restau avait raison, le coin est sympa, à quelques mètres d'une source, et personne ne viendra nous dire quoi que ce soit. Un gros dodo qui fait du bien, avec pour seul défaut d'être sur le mauvais versant de la vallée : au matin, le soleil se fait attendre, prétexte à une grasse matinée bien au chaud dans les duvets...



La forme est bonne, et en tout cas bien meilleure qu'hier, nous repartons vers le Sud Est en "hors piste" à travers les alpages, en suivant approximativement les lignes de niveau. Accord implicite de ne pas aller chercher l'altitude, comme si nous avions eu notre "dose" de décors minéraux.



Au dessus du Tsaté, la carte indique une "mare". J'espèrais l'un de ces petits lacs d'alpage que j'apprécie tant... En réalité, nous nous heurtons à une zone quasiment marécageuse et piétinée par les vaches, ce qui n'arrange rien. Rapide traversée précautionneuse, avant la pause repas.


Il est temps de redescendre si nous voulons faire un peu de route ce soir... Nous prenons la direction de Bréona, et récupérons la piste.



Il est encore tôt, nous croisons quelques promeneurs qui montent vers les alpages, puis rattrapons une dame qui descend vers La Forclaz pour y faire ses courses et avec qui nous finirons la promenade tout en discutant et en plaisantant. Cuisinière dans un chalet, elle aura la gentillesse de me donner sa recette de la Tourte aux Noix. Merci encore madame !


Retour à la voiture, cette fois le Tour est bien fini...



Jours 9 et 10 : Retour en France...

Indépendant du reste. Mais pourtant j'avais envie d'en parler... Là aussi, certainement, un signe de ma difficulté à tourner la page.

Après avoir quitté le Val d'Hérens, nous avons roulé vers l'Est avant de passer la nuit dans la voiture, un peu au dessus d'Andermatt.


Puis direction le Sud, en passant au glacier de la Furka, source du Rhône. Ou plus exactement de ce qu'il en reste...

En 1800 (image du Net)
En 1850 (image du Net)
En 1900 (image du Net)
En 2000 (image du Net)

Et cet été... Avec la nécessité de monter jusqu'à l'entrée de la "Grotte de Glace" pour se rendre compte qu'il reste (encore) un peu de glace...




Soit un recul de plus de 2,3 km en un siècle et demi, d'autant plus marquant que la configuration des lieux le rend plus palpable que sur d'autres glaciers... Et un chiffre qui n'est rien devant la perte totale de volume (cf. surface et épaisseur de la partie supérieure). A ce rythme là, nous avons des craintes à avoir quant au niveau du Lac Léman d'ici quelques années, et ce n'est que la face émergée de l'iceberg, évidemment et soit dit sans mauvais jeu de mot.
J'avais juste envie de le montrer... En espérant que, vous comme moi, nous penserons à ces images la prochaine fois que nous traverserons le Rhône, oublierons d'éteindre alors qu'il fait grand jour, que nous aurons envie de remplacer notre téléphone alors que le précédent fonctionne encore très bien, ou que nous multiplierons nos déchets sans les recycler, etc.
Car quelles que soient les raisons du réchauffement climatique, les glaciers nous prouvent sa réalité. Nous avons passé l'âge de déplacer le débat et de perdre du temps à chercher des coupables qui pourraient tout solutionner à eux seuls si on les ramenait dans le "droit chemin" ou des solutions miracles pour réécrire l'histoire. C'est par l'accumulation de petits gestes quotidiens que nous avons une chance d'améliorer les choses et d'écrire un avenir durable...


Et ceci étant dit, pour reprendre le fil de mon récit... Après cette pause où nous avons également pu admirer toute une famille de marmottes malheureusement peu décidées à se laisser photographier, nous sommes montés au col du Saint Gothard où nous avons déjeuné et exploré un peu les environs.



Ensuite, descente vers le Lac Majeur, également superbe, où nous profitons d'une très bonne pizza, merci les Italiens !



Nouvelle nuit dans la voiture, puis nous rentrons enfin, non sans un détour touristique par Mont Dauphin et Briançon.





Épilogue...

Avec maintenant près de 3 mois de retard, ma conclusion première de cette virée reste inchangée : C'était grandiose, sportif, et il est difficile d'en revenir...

Grandiose : Est-il besoin de commenter ? Les photos parlent d'elles-mêmes...

Sportif : Les étapes classiques sont plutôt longues au regard des dénivelés. Surtout si l'on porte le matériel de bivouac (abri, réchaud, ...) et de montagne (piolet, crampons, ...). Hormis forme physique particulièrement bonne il peut donc être préférable de renoncer à l'autonomie, ou de prévoir des journées plus courtes. Me concernant, j'avoue être plutôt fière d'y avoir fait assez bonne figure, même si je suis (très) loin d'avoir battu des records de vitesse que, de toute façon, je ne recherchais pas.

Difficile d'en revenir : En randonnée, surtout en montagne, on ne triche pas. Ni avec soit-même, ni avec les autres, ni avec l'environnement. Et bon sang ce que cela fait du bien que de retrouver cette authenticité ! Et que c'est dur de la quitter...

Par ailleurs : 
Même si je continue à penser que nous avons pris la bonne décision, surtout avec une tente qui prenait l'eau, je regrette d'avoir dû renoncer aux dernières étapes à cause de la météo. Dommage que nous n'ayons eu ni les moyens ni le temps d'attendre tout simplement que cela ne s'arrange. Non, je ne retournerai pas simplement faire ces 2 ou 3 étapes, d'autres projets m'appellent ailleurs. Mais le retour n'en a été que plus brutal, avec un sentiment d'inachevé.
Contrairement à JL qui ne randonne jamais seul, c'était la première fois que je partais plus de 48h en binôme. Pas simple, surtout pour moi qui sature rapidement de la présence humaine et qui ai un véritable besoin de moments de solitude. Merci à JL d'avoir su le respecter et d'avoir su m'impliquer dans les décisions alors que, beaucoup plus compétent et expérimenté que moi en montagne, il aurait été en droit de (tenter de) m'imposer ses choix unilatéralement. A contrario, faute d'avoir suffisamment confiance en moi sur glaciers (mais cela s'arrange progressivement), je n'aurais jamais oser faire cette randonnée sans lui bien que j'aie pu constater que cela est tout à fait possible (au moins dans le cas présent).
A Valcornera, j'ai vécu des émotions très fortes. Déclenchées par les lieux et mon erreur de parcours, mais résonnants avec des éléments bien plus profonds. Le bon côté, c'est que me replonger dans ces moments à mon retour m'a permis de me libérer de cette angoisse paralysante sur sols instables (moraines, pentes sableuses, ...). Ne reste plus qu'à y acquérir une aisance que je pense que seule l'expérience m'apportera.

Et maintenant... Place aux projets. Les idées sont nombreuses. Ce qui manque le plus, ce sont les jours de congés nécessaires pour les réaliser.


Retour au sommaire

1 commentaire:

  1. Pour de l'inachevé, c'est quand même superbe ! Et pour l'entraînement à marcher sur les gros cailloux posés n'importe comment, c'est quand vous voulez pour des sorties dans le Mercantour.

    RépondreSupprimer