mardi 15 septembre 2015

Tour du Cervin - Jour 4

Jour 4 : De Breuil à Zermatt par le glacier du Théodule


Env 5 km,  D+  750 m, D- 50m
Trace reconstituée
Suivi de +650m en téléphérique, puis 
Env 15 km, D+ 100 m, D- 1900 m
Trace reconstituée 

La journée sera longue, il serait à priori difficile de s'arrêter avant Zermatt et l'étape est donc copieuse au moins en termes de dénivelés. Pour une fois un peu de sérieux... Réveil à 5h, un bon gros petit déjeuner, et on remballe avant de remonter doucement les alpages, vers Plan Maison. 

Hier soir, pour trouver ce point de bivouac pour lequel je remercie encore les marmottes, nous nous sommes écartés du parcours direct. Pour le rejoindre, pas envie de redescendre vers la ville, nous commençons par rejoindre une ferme en saluant le patron déjà occupé à nettoyer les étables, puis coupons directement en suivant les traces présentes dans l'alpage. Après la cotation EE (Excursionniste Expérimenté) des jours précédents, nous expérimentons le VE, Vache Expérimentée... 

Nous retrouvons le sentier sous les pylônes du téléphérique qui va de Breuil à Plan Maison, et pouvons à nouveau admirer le Cervin perdu de vue depuis que nous avions quitté le bivouac.


Un bruit au dessus de nos têtes... Les cabines démarrent, ce sont les moniteurs de ski les premiers à monter. Ils nous adressent quelques bonjours de la main : on est repérés...


Le sentier est agréable, passe devant des étables en cours de restauration, longe une marre au bord de laquelle il aurait surement fait bon passer la nuit... Un traileur nous rattrape et nous double peu avant Plan Maison. Nous le retrouverons sur le glacier après avoir triché, mais nous n'en sommes pas là... Plan Maison se réveille doucement, les premiers skieurs passent des cabines aux oeufs, nous continuons.


Un immense mur domine le paysage. Comme un voile qui se déchire, je me retrouve projetée plus de 25 ans en arrière, dans d'autres montagnes, d'autres circonstances, ... La raison me ramène à la réalité, m'affirme qu'il s'agit de la paroi d'un barrage, ce que les faits me confirmeront quelques minutes plus tard : Ce n'est que le barrage du lac de Goillet.

Photo du Net

Pistes rectilignes, assez larges pour être empruntées par des engins de chantier, herbe des alpages laissant progressivement la place à des champs de moraines 100 fois remaniées par les dits engins de chantier...  J'ose le dire, la suite est moche... Inutile de continuer "pour rien" si ce n'est pour se fatiguer, on bifurque vers le lac de la Cime Blanche pour prendre le dernier tronçon de téléphérique, qui nous mènera au refuge des guides du Cervin sur le Plateau Rosa.

Il est 8h, on s'offre un bon café au refuge. Ambiance cafétéria de station de ski. Ça embaume la raclette, voire la tartiflette... Je reste raisonnable, d'ailleurs seules des pâtisseries sont disponibles à cette heure, mais j'ai la dalle ! Et l'envie de raclette ne me quittera plus...


En sortant du refuge, on voit arriver le traileur qui nous avait doublés à Plan Maison. Mécontent de son temps de montée depuis Breuil (ce qui représente quand même un dénivelé proche de 1400m, réalisé en moins de 2h), décidé à faire mieux la prochaine fois. Je le lui souhaite.


Il nous prévient de nous méfier des crevasses, la neige ne porte pas et il s'est fait quelques frayeurs sans danger... Logique : Il y a un peu de vent, mais il fait CHAUD ! 3500m ou presque, et le thermomètre annonce 7°C... L'isotherme 0°C est à plus de 4200 m. La neige présente sur le glacier fond doucement, et laisse deviner quelques crevasses étroites mais bien présentes sous les pistes, bien plus conséquentes dans d'autres zones.
Le danger est nul à ski, d'autant que les pistes ouvertes aujourd'hui sont plus haut, où l'épaisseur et la tenue de la neige sont surement supérieures, mais les mauvaises surprises sont effectivement tout à fait possibles "à pieds". L'équipement nous parait de mise...


Nous laissons les skieurs à leurs descentes et attaquons la notre. JL a les yeux tournés vers le Cervin,


je regarde plutôt de l'autre côté, vers le Mont Rose...


Il est beau ! Ce sera pour une autre fois, mais il est clair que j'aimerais revenir le voir de plus près, et pas uniquement pour lui tourner autour... Seule déception, son nom ne vient pas de sa couleur, quelle que soit l'heure ou la lumière, mais du patois local, et signifie "glacier". Inutile, donc, d'espérer le voir faire le timide...

Et pis soyons honnêtes, ici, c'est beau partout !



Dans les premières centaines de mètres, là où la glace est encore plus ou moins recouverte, il serait facile de mettre le pied, voire la jambe, dans une crevasse dissimulée. Le piolet n'est pas inutile pour sonder. Plus bas, la glace est à nue, très mouillée. Clairement, ça fond !


Et contrairement à Arolla, pas de gravier pour assurer l'adhérence, résultat : ça glisse, ce que constatent rapidement quelques randonneurs non équipés que nous croisons et qui enchaînent les glissades jusqu'à se retrouver au sol... Chute sans conséquence pour eux, heureusement, mais qui les dépite visiblement. Du coup, je me permets de rire dans mon coin... Ben oui, M'sieur-dame, la glace vive ça glisse, surtout quand c'est mouillé. Et pas que sur les glaciers. Maintenant, vous le savez, à vous de faire vos choix...

Nous quittons le glacier du Théodule pour celui du Furgg. Seul signe du changement, une zone comportant de nombreuses crevasses là où le glacier du Théodule est "repoussé" vers l'Est par une barre rocheuse. Nous profitons des crevasses en question, bien ouvertes mais peu profondes, pour que je refasse divers "exercices" et que je m'entraîne à y descendre et à en ressortir.

Puis nous quittons le glacier. Pause casse-croute à Trockener Steg, à la fois station de téléphérique et centre commercial. Bloc de béton posé sur la caillasse, comme sortant de nulle part... Nous jouons les touristes en terrasse en examinant le Cervin après avoir emprunté ses jumelles à un voisin de table, avalons un (petit) morceaux...


Le temps se couvre, l'orage approche rapidement par le Sud. Nous hésitons à faire la première partie de la descente en téléphérique pour gagner l'orage de vitesse, mais les prix nous dissuadent. Tant pis.



L'orage est encore loin, sans risque réel hormis de se faire mouiller, au moins pour l'instant. C'est parti pour la descente. Le sentier est agréable, offre de belles vues sur les sommets voisins et la vallée. Nous ne traînons pas et perdons de l'altitude rapidement.



Petit à petit, l'orage nous rattrape. La pluie éparse que les polaires suffisaient à stopper se transforme progressivement en violentes ondées que la terre, bien sèche, n'arrive plus à absorber. Nous sommes à l'abri sous les ponchos, mais ça commence à devenir franchement limite dans certains passages à cause des ruissellements qui transforment le sentier en torrent et l'herbe en patinoire. Nous profitons d'une grange (aux allures typiques de chalet de bois) en cours de restauration et quasiment vide pour nous mettre à l'abri le temps que cela se calme. Le sol de terre battue est couvert de débris de verre mais, hormis cela, l'adresse serait à retenir comme point de bivouac discret et confortable...

Après une bonne heure d'attente, la pluie se calme enfin, le ciel se dégage un peu, et nous en profitons pour descendre vers Furi, village à l'ambiance de club de vacances privé : pas de commerce apparent hormis quelques restaurants, le seul moyen de transport motorisé est le télécabine qui descend vers Zermatt, les chalets sont dispersés sans que l'on ne distingue vraiment de "rue" ni de limite aux jardins, ... Il est certainement très agréable d'y vivre. Mais le traverser donne la sensation d'entrer dans une propriété privée où l'on n'est pas forcément le bienvenu.


La descente continue doucement, en admirant les chalets, par un sentier agréable entre les arbres et les prairies. On se croirait dans un jardin public paysagé et bien entretenu.



Nous gardons un oeil disponible au cas où un coin pour bivouaquer se montrerait avant Zermatt, mais il commence à être un peu tard pour véritablement explorer et la zone ne s'y prête vraiment pas. Espoir déçu, nous étions prévenus. A Zermatt, nous allons jusqu'au camping, mais faisons demi-tour avant même d'avoir atteint le point d'accueil tant, hormis l'herbe bien verte, il nous parait démoralisant avec ses allures de terrain de foot récupéré pour accueillir des réfugiés égarés... Nous finissons par nous rabattre sur l'Auberge de Jeunesse, au tarif (presque) raisonnable de 78 euros par personne. Au moins, nous profiterons d'un bon lit et, surtout, de la douche chaude. Y'a bon !

Dîner dans la chambre, puis soirée de touristes typiques dans la ville, entre les groupes folkloriques présents pour un festival. Curieuse population que celle des rues de Zermatt, disparate, internationale, hétéroclite, ... mais avec un centre d'intérêt commun, le Cervin. Autant il était "négligé" à Breuil, autant, ici, il attire tous les regards, est omniprésent, dans le paysage, dans les vitrines et même dans le cimetière des alpinistes en centre ville ! La nature humaine ne changera jamais...


A la terrasse d'un bar, nous discutons un moment avec divers randonneurs qui font le tour dans l'autre sens, et auprès de qui nous obtenons des infos sur les possibilités pour la suite. C'est la météo qui décidera : les prévisions sont mauvaises et il pleuvra d'ailleurs beaucoup durant la nuit.

En rentrant à l'Auberge, nous cédons à la tendance générale et admirons les illuminations du Cervin, destinées à célébrer les 150 ans de sa première ascension le 14 juillet 1865. Le ciel est de la partie, et alors que les illuminations s'allument une par une le long de la voix suivie à l'époque (l'actuelle voie normale), les éclairs dessinent la silhouette quasi mythique en contre-jour. Ce que, malheureusement, nos appareils photos seront incapables de rendre.

Photo du Net


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